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L’extension de l’obligation de moyens du diagnostiqueur

Par un arrêt en date du 14 septembre 2017 (n°16-21.942), la troisième chambre civile de la Cour de cassation a confirmé sa jurisprudence relative à l’obligation de moyens étendue du diagnostiqueur amiante.

Le diagnostic amiante a vocation à être réalisé par un professionnel à l’initiative du propriétaire à l’occasion de la vente de son bien immobilier.
Le dossier de diagnostic doit être remis à l’acquéreur et permet de déterminer la présence ou non d’amiante dans le bien vendu.

Selon les dispositions de l’article R. 1334-14 du Code de la santé publique, les biens concernés sont ceux dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997.

Le Code de la santé publique régit en outre l’intervention et les modalités techniques des investigations portées par le professionnel diagnostiqueur.

En l’occurrence, postérieurement à la vente d’une maison et à une expertise technique, les acquéreurs d’une maison ont assigné la société qui avait été chargée du diagnostic de repérage d’amiante, se plaignant de la présence d’amiante sur les cloisons et doublages des murs et non relevée dans le diagnostic annexé à l’acte notarié.

La Cour d’appel a rejeté les demandes au motif que l’ensemble des parois des murs et cloisons était recouvert de papier peint et que les plaques de revêtement muraux litigieuses n’étaient ni visibles ni accessibles.

Il était également retenu que la société diagnostiqueur avait respecté les limites de sa mission tant d’un point de vue réglementaire que contractuel, de sorte que les demandeurs ont été déboutés de leurs demandes.

Cette décision était pourtant conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation qui juge que le diagnostiqueur est tenu des strictes limites des missions qui lui sont contractuellement confiées.

Ainsi, dans l’hypothèse où il est mandaté par un professionnel de l’immobilier (une SCI par exemple), il ne peut lui être reproché de ne pas avoir effectué une recherche qui excède sa mission contractuelle ni un manquement à son devoir de conseil (Cass. 3ème civ, 27 septembre 2006, n° 05-15.924).

Dans le même sens, le diagnostiqueur, en charge d’une mission complète de diagnostic, ne peut pas limiter son intervention à un contrôle visuel ni à certaines parties de l’immeuble, et doit donc procéder à une recherche systématique (Cass. 3ème civ, 03 janvier 2006, n° 05-14.380).

Pour autant, en l’espèce, la Cour de cassation, au visa de l’article 1240 du Code civil (ancien l’article 1382 du même code), censure l’analyse et le raisonnement de la Cour d’appel et confirme donc que le diagnostiqueur n’est tenu que d’une obligation de moyens renforcée.

En effet, la Cour juge que :

« Qu’en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions soutenant que l’opérateur ne pouvait pas limiter son intervention à un simple contrôle visuel mais devait mettre en œuvre les moyens nécessaires à la bonne exécution de sa mission, tout en relevant que le diagnostiqueur s’était abstenu d’effectuer des sondages non destructifs, notamment sonores, et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, dès lors qu’il n’avait effectué de repérage que dans les parties visibles, il pouvait conclure à l’absence d’amiante dans les autres parties sans émettre de réserves, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
CASSE ET ANNULE […] »

Il est donc reproché à la Cour d’appel d’avoir jugé infra petita sans répondre à un moyen soulevé par les demandeurs.

La Cour de cassation relève que les motifs de faits soulevés par les demandeurs soulignaient que le diagnostiqueur :

  • S’était limité à un simple contrôle visuel,
  • S’était abstenu d’effectuer des sondages non destructifs
  • Et n’avait pas recherché si, après un repérage dans les parties visibles, il pouvait conclure à l’absence d’amiante dans les parties non visibles sans émettre de réserves.

Les carences du diagnostiqueur méritent donc que l’affaire soit renvoyée devant une autre cour d’appel pour une nouvelle appréciation par les juges du fond.

Le diagnostiqueur, bien que son contrôle ait vraisemblablement été réalisé dans les limites réglementaires et contractuelles, ne présente pas, pour la Cour de cassation, des garanties de moyens suffisants au titre de la bonne exécution de sa mission.

Cet arrêt est situé dans la droite ligne de la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Ch. Mixte, 8 juillet 2015, n° 13-26.686), lequel fait d’ailleurs référence à la notion large et imprécise des « règles de l’art », et confirme donc que le diagnostiqueur est tenu d’une obligation de moyens accentuée dans l’accomplissement de sa mission.

La Cour de cassation avait déjà précisé que le contrôle dans le cadre du diagnostic amiante n’était pas purement visuel et nécessitait des vérifications n’impliquant pas de travaux destructifs :

« Mais attendu, d’une part, qu’ayant exactement retenu que le contrôle auquel devait procéder le diagnostiqueur n’était pas purement visuel, mais qu’il lui appartenait d’effectuer les vérifications n’impliquant pas de travaux destructifs et constaté que la société A… n’avait pas testé la résistance des plaques, ni accédé au comble par la trappe en verre située dans le couloir, la cour d’appel a pu en déduire que cette société avait commis une faute dans l’accomplissement de sa mission » (Cass, 3ème civ, 21 mai 2014, n° 13-14.891).

Le diagnostiqueur n’est donc toujours pas tenu d’opérer des investigations destructives impératives mais toutes les techniques de recherches doivent selon toute vraisemblance excéder le simple contrôle visuel qui apparait comme insuffisant pour un diagnostic de cette ampleur.

L’étendue de l’obligation de moyens démontre bien que les diagnostiqueurs immobiliers, en quelle que matière que ce soit, sont soumis à une appréciation juridique et judiciaire sévère de leurs activités.

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