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Les règles applicables en matière de congé dans le cadre d’un bail d’habitation (Cass. Civ. 3ème, 28 novembre 2016 (R.G. n° 18-18193)

Un récent arrêt de la Cour de cassation en matière de bail d’habitation permet de rappeler les règles légales applicables en matière de congé donné par le preneur.

Le congé délivré par le locataire est strictement encadré par les dispositions de l’article 15 I de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 et l’arrêt apporte des précisions sur la date de fin de préavis lorsqu’un congé est délivré par le preneur.

1. Les règles légales applicables en matière de congé dans le cadre d’un bail d’habitation :

Ainsi, il convient de rappeler qu’en principe le délai de préavis applicable au congé est de trois mois lorsqu’il émane du locataire (des délais de préavis plus longs sont prévus lorsque le congé est délivré à l’initiative du bailleur).

Certaines hypothèses permettent au locataire de disposer d’un délai réduit de préavis, à condition de l’invoquer et de le justifier dans la lettre de congé, à savoir : dans certaines zones géographiques (prévues aux dispositions de l’alinéa I de l’article 1 de la loi n° 89-462 du 06 juillet 1989), pour un premier emploi, une mutation, une perte d’emploi ou un nouvel emploi consécutif à une perte d’emploi, un changement de domicile sur justification médicale certifiée, pour les bénéficiaires du RSA ou de l’AAH ou encore de l’aide personnalisée au logement.

A défaut de dénonciation et de justification dans le congé, le délai de préavis sera de trois mois.

La forme du congé est également encadrée puisqu’elle doit nécessairement, selon les dispositions légales, être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, signifié par acte d’huissier ou remis en main propre contre récépissé ou émargement.

Le délai de préavis court à compter du jour de la réception du congé par le bailleur et à l’expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d’occupation. S’il se maintient dans les lieux il devient un occupant sans droit ni titre.

Le locataire reste redevable, durant le délai de préavis, des loyers et des charges.

Sur ce point, il convient de distinguer deux situations.

Lorsque le congé provient du bailleur, le locataire n’est redevable du loyer et des charges que pour le temps où il a occupé réellement les lieux, soit jusqu’à l’état des lieux de sortie et à la remise des clés.

En revanche, lorsque le congé a été notifié par le preneur lui-même, celui-ci est redevable du loyer et des charges pour tout le délai de préavis, à moins que le logement ne se trouve occupé avant la fin du délai de préavis, et sous la condition de l’accord du bailleur, par un nouveau locataire.

C’est sur cette question que la Cour de cassation a apporté une précision intéressante avec l’arrêt de la troisième Chambre civile de la Cour de cassation en date du 28 novembre 2019.

2. La fixation du délai de préavis dans le congé délivré par le preneur :

Dans cette affaire, des locataires ont donné congé à leur bailleur par courrier, reçu le 10 novembre 2016, et pour la date du 12 février 2017.

Les clés ont été restitués le 10 février 2017 après établissement de l’état des lieux de sortie.Les bailleurs ont restitué le dépôt de garantie, déduction faite d’une somme correspondant au loyer courant du 10 au 12 février 2017.

En définitive, les preneurs avaient visiblement réglé un loyer correspondant à la période du 1er au 10 février 2017, cette date correspondant à l’expiration du délai légal de préavis de trois mois courant à compter du 10 novembre 2016 (date de réception du congé).

Pour leur part, les bailleurs avaient comptabilisé comme temps d’occupation la période du 10 au 12 février 2017, date que les locataires avaient expressément indiquée, dans leur congé, cette date étant également correspondant également à l’issue du délai de trois mois après la réception du congé par le bailleur.

Les preneurs ont donc saisi le tribunal d’instance d’une demande de restitution de cette somme, invoquant notamment une erreur de date dans leur congé. 

Le tribunal d’instance a accueilli la demande en retenant que le délai légal de préavis expirait le 10 février 2017 et que toute prolongation d’occupation devait faire l’objet d’un accord du bailleur, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

En ce sens, il avait été retenu par le juge que les bailleurs avaient informé les locataires de l’impossibilité de repousser la date de réalisation de l’état des lieux au 12 février 2017, imposé qu’il ait lieu le 10 février 2017, date d’expiration du délai légal de préavis. L’état des lieux et la remise des clés sont d’ailleurs intervenus le 10 février 2017, de sorte que, pour le juge de première instance, les locataires ne pouvaient plus occuper le logement après cette date.

Le raisonnement du tribunal d’instance était également basé sur l’absence d’accord du bailleur en faveur d’une occupation des locataires postérieure à la date d’expiration du délai légal de préavis.

Il s’agissait donc pour la Cour de cassation, saisie par les bailleurs, de savoir si une date erronée fixée par le preneur dans son congé, et postérieure au délai légal de préavis, prime sur toute autre date.

A cette question, la Cour répond sans hésiter par l’affirmative en cassant le jugement intervenu et en exposant, au visa des dispositions de l’article 15 I de la loi précitée du 6 juillet 1989, et dans un attendu de principe, que :

« lorsque le congé est donné par le preneur pour une date déterminée, le bail est résilié à cette date si elle est postérieure à l’expiration du délai légal de préavis ».

Pour la Cour de cassation, le bail a donc pris fin à la date du 12 février 2017, date de congé donnée par les preneurs.

L’arrêt de la Cour semble retenir une application stricte des dispositions de l’article 15 I de la loi du 06 juillet 1989 précitée et qui consacre que le preneur « est redevable du loyer et des charges concernant tout le délai de préavis si c’est lui qui a notifié le congé, sauf si le logement se trouve occupé avant la fin du préavis par un autre locataire en accord avec le bailleur ».

En effet, la Cour précise en son arrêt que les loyers étaient bien dûs jusqu’au 12 février 2017, à défaut de renonciation certaine et non équivoque du bailleur à percevoir les loyers jusqu’au terme du bail, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

Il est donc désormais clair que la date de fin de bail est celle déterminée par le preneur dans son congé, même si celle-ci est postérieure au délai légal.

Cet arrêt semble donc méconnaître les dispositions légales applicables en matière de préavis.

En effet, il ressort clairement des dispositions de l’article 15 I que le délai de préavis est de trois mois lorsque le congé émane du locataire et que le délai court à compter de la réception du congé par le bailleur.

Dans sa décision, la Cour de cassation admet donc un rallongement du délai de préavis au bénéfice du bailleur.

Il va sans dire que la décision aurait certainement été différente si le locataire avait déterminé comme date de fin de bail une date antérieure au délai légal de préavis, celui-ci ne pouvant être inférieur à trois mois.

En outre, ce qui est surprenant dans cet arrêt, et ce que la Cour semble admettre, tient en la déduction du loyer de la période litigieuse sur le dépôt de garantie alors même que cela est en principe proscrit.

En effet, il est de principe interdit d’imputer des impayés de loyers sur le dépôt de garantie.

De fait, la principale conséquence tient simplement que si le preneur donne congé pour une date postérieure au délai légal de préavis, il reste redevable du loyer et des charges jusqu’à cette date.

Afin d’éviter toute difficulté pour le locataire, il semble donc judicieux pour ce dernier d’éviter de viser une date précise dans son congé et d’opter pour la formule selon laquelle « le bail prendra fin à l’issue du délai légal de préavis » et sans oublier de motiver et justifier la situation s’il est éligible au délai de préavis réduit.

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